Bonjour.
Je boucle la boucle du sujet que j'ai ouvert il y a quelques semaines sur les questions obligations légales égalité pro F/H. Dans la zone de flou manifeste dans laquelle sont les CAE qui ont témoigné sur l'Agora, on a poursuivi sur notre intention initiale de se plonger dans les calculs (Index égalité pro, diagnostic égalité de l'ANACT), en s'appuyant sur une entrepreneure Oxalis spécialisée sur ce champ (elle nous a fait gagner pas mal de temps dans la qualification des données et dans l'évitement des petits pièges pour le remplissage).
Je commence par l'Index égalité, le remplissage du tableur amène à une impasse sur 2 items, ce qui rend l'Index "incalculable". Les 2 items sont interreliés d'ailleurs : taux d'augmentation individuelle ; pourcentage de salariées de retour de congé mat ayant bénéficié d'une augmentation dans l'année suivant le retour. Avec la forme salariale dominante de l'entrepreneuriat salarié dans nos CAE, la notion d'augmentation individuelle et de pilotage d'une politique salariale n'a aucun sens.
J'ai l'habitude de dire qu'une CAE est 1 société (le cadre juridico-administrativo-légal des activités) qui englobe des centaines d'entreprises (le contenu économico-commercial quotidien des activités => Chaque entrepreneur-e est une mini-entreprise !), là où dans une boite "normale" il n'y a en gros qu'1 entreprise (ou 2) à l'intérieur de la société, c'est à dire 1 seul "patron" responsable réel de tous les salaires de la société (et dans la CAE il y a des centaines de "patrons" qui fixent chacun de 1 (l'entrepreneur-e travailleur-e en solo) à 10/15 salaires (l'équipe structure).
Nous avons réfléchi à la possibilité de se centrer uniquement sur les salarié-es équipe structure pour calculer les 2 items incalculables liés aux augmentations. Mais c'est un biais très réducteur (pour 10 salarié-es à Oxalis il y a 9 ESA et 1 membre équipe structure), et en plus qui n'a aucun sens statistique : l'Index est conçu pour les entreprises de plus de 50 personnes, or l'équipe à Oxalis c'est une quinzaine de personnes, une masse de personnes trop faible et trop sensible au moindre mouvement dans l'équipe, l'Index pouvant alors faire les montagnes russes d'une année sur l'autre sans aucun contrôle réel de la direction.
Bref, tous les éléments indiquent selon moi le caractère incalculable de l'Index pour les CAE. Ca ne veut pas dire qu'il ne faut pas faire l'exercice, en particulier pour les autres items qui eux sont calculables. La saisie en ligne du calcul de l'Index demande toutes les infos sur tous les items. C'est d'ailleurs intéressant à regarder pour voir si, quand c'est pertinent, votre CAE a une organisation qui favorise l'égalité pro.
L'avantage du côté incalculable c'est de supprimer la pression induite par la logique d'un indicateur unique (l'obligation de dépasser les 75/100, ou de mettre en place des actions correctives à court terme). Mais ça n'enlève pas l'obligation de calculer toutes ses composantes, et ça n'enlève pas l'intérêt d'observer le positionnement de sa CAE sur ce sujet (et de travailler dessus de manière pro-active, sans la pression de risquer une amende et sans le stress de devoir modifier quelque chose sur lequel on n'a pas de prise réelle).
D'ailleurs sur le sujet "pourcentage de salariées de retour de congé mat ayant bénéficié d'une augmentation dans l'année suivant le retour" il se trouve que depuis un an la DUP (devenu CSE) travaille sur un chantier "Parentalité apaisée", principalement centré sur la problématique de la fragilisation de l'activité économique des femmes pendant leur congé mat (mais on détecte un risque similaire pour le congé parental, que ce soit la mère ou le père qui le prennent). Ca va aboutir dans quelques semaines à la publication d'un guide de sensibilisation sur le sujet (qui donne plein d'éléments pour que les entrepreneur-es anticipent/préparent au mieux leur période de congé).
Tout ça pour dire que même si l'item est incalculable au sens des institutions dans leur calcul de l'Index, il peut avoir du sens de travailler dessus "à notre manière" et dans notre cadre, celui de l'entrepreneuriat salarié.
J'irai beaucoup plus vite sur le Diagnostic égalité pro. Là aussi il y a des domaines qui n'ont aucun sens pour une CAE, mais le Diag est pensé comme une base de données à analyser et sur laquelle proposer un plan d'actions de manière volontaire, donc dans le tas il y a toujours des éléments utilisables par la CAE pour progresser. C'est la structure qui choisit elle-même ses domaines prioritaires et ses actions, l'important c'est de progresser d'une année sur l'autre et de tenir au mieux ses engagements (donc pas la peine d'être hyper-volontariste : ne pas hésiter d'ailleurs à valoriser ce que la CAE a déjà fait sans qu'on lui demande rien, à Oxalis par ex on a commencé à avancer concrètement sur le sexisme au travail, ce qui se valorise comme des actions "Conditions de travail" favorisant l'égalité F/H).
Bonne fin de semaine.
Christophe Bellec