Des questions précises sur le dispositif de cumul d'une allocation chômage avec un emploi salarié (en l'occurrence en CESA)

    Bonjour.

    J'échange avec un potentiel futur entrepreneur, dont la particularité est de travailler depuis plusieurs années en intérim, alternant des périodes sous contrat et des périodes sans contrat durant lesquelles il bénéficie d'une allocation chômage.
    Il essaie de transposer son mode de fonctionnement de l'intérim en mode entrepreneuriat CESA (en signant des contrats de régie en direct avec ses entreprises clientes, sans passer par l'agence d'intérim). Il se dit qu'il va avoir la même configuration d'activité, avec des périodes durant lesquelles il n'aura pas de contrat en cours auprès d'une entreprise cliente.
=> Il demande donc si en étant en CAE (et en CESA) il pourra continuer à bénéficier d'une allocation chômage dans ses mois creux, pas simplement pendant les premiers mois mais sur plusieurs années (sans limitation).

    Dans mes souvenirs j'avais en tête une période limitée de cumul (du genre 15 mois max, ou bien la durée max de l'ARE c'est à dire 4 mois habituellement). Je me suis rendu compte qu'il y a eu des changements par rapport à mes souvenirs en lien avec la nouvelle circulaire Unedic de décembre 2019 (sur la durée max de cumul entre allocation et salaire, et sur le fonctionnement des droits rechargeables).
     L'objet de mon message est de vérifier si je comprends bien les textes régissant cette évolution du cadre. Je pourrais appeler Pole emploi mais on va commencer par le partager au réseau des CAE, quelqu'un a sans doute déjà la réponse.

    Je vois deux pages ressources du site Unédic, que j'ai épluchées :  

  1. celle sur la question "Ai-je toujours droit à des allocations chômage si j’accepte un travail à temps partiel ? : https://www.unedic.org/indemnisation/vos-questions-sur-indemnisation-assurance-chomage/ai-je-toujours-droit-des-2
  2. celle sur les droits rechargeables : https://www.unedic.org/indemnisation/fiches-thematiques/droits-rechargeables  

    Sur mon 1er questionnement sur la durée maximale de cumul entre allocation et salaire : sur la page 1 c'est clairement indiqué qu'il n'y a pas de limite max :

Le cumul de vos allocations avec votre salaire peut durer aussi longtemps qu’il vous reste des allocations chômage

Seuls les jours indemnisés dans le mois sont décomptés de votre durée d'indemnisation restante. Chaque jour non indemnisé décale d’autant la date de fin de vos droits. En travaillant à temps partiel pendant votre période d’indemnisation, vous allongez ainsi la durée de vos droits car vos allocations sont versées sur une période plus longue.

    Avec cette info, ça veut dire que le cumul peut durer longtemps (au-delà des 24 mois de l'ARE par ex), dès l'instant où il reste des droits. J'ai juste un questionnement sur le fait que dans cette page ils parlent tout le temps de "temps partiel", sous-entendu qu'avec un emploi à temps plein ça ne fonctionnerait plus. Et comme de base il n'y a pas de temps de travail sur un contrat CESA, mais qu'on considère qu'au-delà d'une rému au smic temps plein (1554 € brut mensuel) c'est un équivalent temps plein, ça voudrait dire qu'en dépassant ce montant ça ne marcherait pas.
    Mais dans cette même page il est également écrit que :

Le cumul de votre salaire avec vos allocations est possible quels que soient la durée et le type du contrat de travail.

    Donc même un temps plein pourrait marcher, l'expression "temps partiel" étant à prendre au sens "compréhension grand public" plutôt que technique.
=> Je suis déjà preneur de retour sur ce 1er volet (ma compréhension d'une durée de cumul non limitée, et de cette histoire de "temps partiel".

    Je passe ensuite à la 2ème question du porteur de projet qui raisonne en mode intérim : que se passe t-il quand les droits initiaux (ceux existants au moment du début du CESA) seront épuisés ? Car même étalée sur une tartine de 5 ans, la quantité totale de confiture au départ reste la même :)). A ce moment là on arrive sur la question des droits rechargeables et la page ressource n°2.
     Les droits rechargeables permettent de créer au fur et à mesure de la "nouvelle confiture"... mais selon moi elle n'est pas remise dans le 1er pot (en rallongeant la quantité des droits initiaux) mais elle est mise dans un 2ème pot nouveau, qui ne serait utilisable qu'à condition qu'il y ait eu une rupture de contrat (en clair, à la fin du CESA). C'est ce que je comprends en lisant ça (j'ai mis en rouge des points saillants) :

Comment recharger ses droits ?

Un demandeur d’emploi dont les droits sont épuisés peut bénéficier de nouveaux droits, s’il a travaillé au moins 4 mois depuis sa dernière ouverture de droits. Ce rechargement de droits ouvre une nouvelle période d’indemnisation avec un nouveau montant d’allocation et une nouvelle durée.

Quelles conditions pour recharger ses droits

Pour recharger ses droits, le demandeur d’emploi doit :

  • avoir travaillé au moins 88 jours ou 610 heures (soit environ 4 mois) depuis sa dernière ouverture de droits. Toutes les activités exercées sont prises en compte, à condition de n’avoir jamais servi au calcul d’un droit précédent. Et ce, pendant les 24 mois maximum qui précèdent la perte d’emploi, ou 36 mois pour les allocataires âgés d’au moins 53 ans.
  • avoir perdu toutes ces activités de façon involontaire. S’il s’agit d’un départ volontaire, il faut avoir travaillé au moins 65 jours travaillés ou 455 heures depuis ce départ.
  • remplir toutes les autres conditions pour accéder à l’allocation.

    Voici ma lecture : pour accéder aux droits créés grâce à la rémunération en CESA, il faut que le CESA ait cessé. C'est là la différence avec l'intérim et la succession de contrats CDD (c'est à dire de fermeture et d'ouverture de droits), alors qu'en CESA-CDI le même contrat continue à courir et ne permet pas d'accéder à une allocation une fois les droits initiaux épuisés.

=> Merci de votre retour / avis sur ce deuxième volet

    De manière plus générale, sur ces différents éléments "de droit commun" (venant des pages générales de l'Unédic), y a t-il des éléments qui seraient plus spécifiques au contrat CESA ?

    Je vous remercie par avance de vos éclairages :) !
    Christophe Bellec

Bonjour.

Je retente ma chance sur ce sujet un peu technique à cheval entre assurance chômage et salariat CESA. Je pourrais poser la question à Pole emploi mais venant de la part d'une CAE ça fait un peu "entourloupe" si on n'a pas un interlocuteur qu'on connait bien en face.
Le potentiel futur entrepreneur est en train de poser cette même question de son côté à Pole Emploi (ça sera plus soft si c'est lui qui demande), sauf que je ne fais pas vraiment confiance à la qualité technique de la réponse qu'il aura (ça dépend trop de l'interlocuteur qui lui répondra :( ), alors si j'ai de mon côté CAE des infos pour compléter je me sentirais plus serein.

Si vous préférez un échange en direct c'est possible au 06 84 95 66 65.

Bonne journée.
Christophe

Bonjour,

Voici quelques éclairages après investigations de notre service juridique que je partage à toutes et tous, après premier échange avec Christophe :

Bien cordialement

Anne Claire PIGNAL, Déléguée Fédération des CAE / CGScop

Bonjour.

Je remets  2€ dans la machine sur exactement la même situation, car il y a une question que je n'avais pas repérée au 1er passage... :( Je m'étais focalisé sur l'accès à de nouveaux droits une fois les droits initiaux épuisés, et je n'avais pas regardé ce qui pouvait empêcher d'accéder aux droits initiaux en cours. Et l'un des motifs pourrait être que, si un mois donné le-la CESA perçoit une rémunération au-dessus du plafond de cumul allocation/salaire, il-elle sortirait du dispositif ARE et ne pourrait plus y revenir... sauf en cas de rupture de contrat CESA.

Je reprends la circulaire Unédic de novembre 2019, il y a page 120 ces explications :

2. CAUSES DE CESSATION DU PAIEMENT DES ALLOCATIONS
Les  causes  de  cessation  du  paiement  des  allocations  trouvent  toujours  une  origine  dans  un
changement dans la situation de l’allocataire et peuvent avoir plusieurs explications : l’allocataire cesse
d’être inscrit comme demandeur d’emploi, perçoit un revenu d’activité ne permettant pas le cumul
avec les allocations, des indemnités de sécurité sociale ou des prestations familiales non cumulables
avec les allocations de chômage, obtient sa retraite à taux plein ou fait l’objet d’une sanction par Pôle
emploi,  etc.  Ces  changements  de  situation  doivent  naturellement  être  déclarés  à  la  fin  du  mois
considéré. Les différents cas d’interruption du versement de l’allocation d’aide au retour à l’emploi
sont énumérés dans quatre paragraphes de l’article 25 du règlement d’assurance chômage.

On y trouve la mention "perçoit un revenu d’activité ne permettant pas le cumul avec les allocations". Que la personne n'ait plus d'allocation complémentaire un mois donné parce que ça dépasse le plafond, ça c'est logique, pas de problème. Mais si le mois suivant le revenu est plus faible, et qu'à nouveau il est sous le plafond de cumul, l'entrepreneur-e peut-il-elle avoir droit à nouveau à une allocation complémentaire ?

En 1ère lecture des éléments de la circulaire Unedic, je pense que non... :(( je trouve cet article page 128 (je mets une capture d'écran le copier-coller ne fonctionne pas sur cette page là) :

im

Le point qui coince, c'est "la situation de chômage involontaire", qui selon moi renvoie grosso modo à la rupture du contrat CESA. J'ai été regarder le chapitre qui en parle un peu plus loin dans la circulaire, je ne vois pas apparaitre le cas de figure d'une diminution de revenu (ça parle de perte d'emploi).

Donc pour bénéficier du cadre tel que synthétisé dans le mail d'Anne-Claire ci-dessus, il faudrait y rajouter une condition : ne pas interrompre (même un mois) la situation de cumul allocation et salaire, c'est à dire ne pas tirer un salaire qui dépasserait le plafond de cumul.
=> Anne-Claire pourrais-tu vérifier cette analyse auprès du service juridique ?

A ce stade j'ouvre un autre espace de questionnement, qui serait dans les spécificités du contrat CESA par rapport aux autres contrats salariés. La rémunération en CESA est composée d'une part fixe et d'une part variable, c'est à dire qu'elle peut changer d'un mois sur l'autre.
=> Est-ce qu'il existerait pour Pole Emploi une clause sur les contrats à rémunération variable (comme les VRP) où la "situation de chômage involontaire" serait due non pas à une perte d'emploi mais à une "perte de travail" en ayant gardé son emploi ? Ca ressemblerait à un dispositif de chômage partiel / activité partielle tel qu'on le pratique avec le Covid.

Merci par avance pour ces précisions.

Christophe

 

 

Si un-e CESA continue à percevoir un peu d'allocation en complément, sans "rompre le fil", tout va bien

Bonsoir Christophe,

je n'aurai pas de réponses techniques à tes questions et interrogations mais plus une réflexion d'ordre générale et politique. Je ne pense pas que l'objectif d'une CAE est de chercher à construire un parcours alternant périodes de chômage et périodes de travail rémunéré en optimisant les possibilités offertes par les droits générés des cotisations sociales. Notre but est bien de permettre à des porteurs de projet de devenir entrepreneurs ET salariés et donc de vivre de leur travail, en autonomie. Que les entrepreneurs sur la période de 3 ans avant le sociétariat ou la création en nom propre puissent bénéficier de leurs droits tout en commençant à être salariés, est normal. C'est le cas pour tout créateur d'entreprise. En cas de baisse d'activité dans des situations comme celle de la crise liée au COVID les entrepreneurs salariés peuvent recourir à l'activité partielle parce que c'est exceptionnel et non prévisible. Si nous proposons autre chose cela me pose un problème et est contradictoire avec le statut même d'entrepreneur-salarié, qui n'est pas intérimaire entrepreneur. Ce serait intéressant d'avoir un débat politique et de fond au sein de la Fédération

Bonne soirée

Isabelle Amauger/Elan créateur

Bonsoir Isabelle.

Il serait effectivement intéressant d'avoir un débat politique sur la question que je résumerais "à quoi sert une CAE ?". Il se trouve que dans le cas de figure pour lequel je pose ces différentes questions techniques, mon intention n'est pas d'aider l'entrepreneur à optimiser des droits sociaux, car ce n'est pas ce qu'il nous demande : ce qu'il demande c'est de l'accompagner à sécuriser son parcours, c'est à dire savoir ce qu'il est possible de faire ou pas, savoir où sont ses droits afin de faire des scénarios, optimistes comme pessimistes.

Pour reprendre tes formulations : il me semble clair que j'accompagne la personne à devenir entrepreneur-salarié (en statut et aussi en posture), ce qui est un point d'arrivée, pas un point de départ. Aujourd'hui au départ elle est effectivement "intérimaire entrepreneur", mais si elle vient nous voir c'est qu'elle a envie de faire autrement, mais sans trop savoir comment faire, et avec son propre référentiel, son expérience vécue du travail qui sont imprégnés par l'intérim.
Il s'agit donc de construire avec elle ce parcours qui va l'emmener vers l'entrepreneuriat salarié, mais qui part "d'où elle part", avec ses questions, ses besoins d'éclairage, pour faire ses choix (elle est arrivée il y a un mois).

C'est la 1ere fois en 15 ans que je croise un-e entrepreneur-e qui vient du monde de l'intérim. Et je n'ai pas souvenir d'avoir entendu parler dans les échanges entre CAE du secteur de l'intérim, ou de passerelles possibles entre "intérimaires autonomes" et "entrepreneur-es autonomes". On dirait que ce sont des secteurs assez étanches, mais comme je ne le connais pas je ne saurais pas l'affirmer.
Peut-être d'ailleurs que vous avez eu d'autres expériences avec ce public, n'hésitez pas à les partager (et si je partage ces questions (et les réponses) sur ce forum, c'est que ces infos peuvent aussi intéresser d'autres CAE).

En bref je suis en train d'explorer quelque chose de nouveau (pour moi, pour ma coop), avec des questions nouvelles apportées par la personne, auxquelles essayer de répondre. On ne s'était jamais penché à ce niveau de détail sur le fonctionnement de la couverture chômage (mes collègues de l'équipe non plus, comme quoi de base on ne cherche pas à "optimiser"), mais la personne a besoin de ce niveau de détail pour savoir où elle met les pieds.
En tout cas je ne me sens pas en déphasage avec les valeurs ou la raison d'être de ma coop (une partie de notre RE évoque l'intention "d'expérimenter une organisation [...] qui permette à chacun-e d'évoluer et de trouver sa place").

Bonne soirée.
Christophe